La loi « Kasbarian-Bergé », 2 ans après : de la prévention à l’expulsion 

27.10.2025
Mis à jour le 24.10.2025
4 min

 
En 2024, 24 556 ménages ont été expulsés de leur logement avec le concours de la force publique, soit une hausse de 29 % en un an et de 223 % en vingt ans ! Après plusieurs années d’efforts pour renforcer la prévention des expulsions locatives — notamment à la suite de la crise sanitaire — la dynamique s’est brutalement inversée : la France mène désormais une politique qui fait la part belle aux expulsions. 
 
Cette dérive a trouvé son point d’orgue dans la loi dite « Kasbarian-Bergé » du 27 juillet 2023, qui a profondément fragilisé les locataires en difficulté, à un moment où leur pouvoir d’achat était mis à mal par l’inflation. Elle a également exacerbé les tensions entre locataires et propriétaires, conduisant notamment à la multiplication d’expulsions illégales. « Cette loi ne constitue pas un point de départ : elle incarne et accentue une évolution déjà amorcée, marquée par le recul des politiques de prévention, l’absence de circulaires protectrices et le renforcement des instructions préfectorales en faveur d’une exécution rapide des décisions d’expulsion. » déplore Christophe Robert, délégué général de la Fondation pour le Logement des Défavorisés.
 
Face à ce constat, la Fondation pour le Logement a mené une enquête auprès de son lieu d’accès aux droits parisien l’Espace Solidarité Habitat (ESH), de sa plateforme Allô Prévention Expulsion (bilan 2025) et d’associations du réseau Accompagnement aux droits liés à l’Habitat (ADLH) qu’elle soutient (bilan 2025).Les effets de la loi « Kasbarian-Bergé » sur les ménages en impayés de loyer y apparaissent alarmants à tous les stades de la procédure :  
77 % des associations du réseau ADLH déclarent qu’il est plus compliqué qu’auparavant d’obtenir des délais de paiement. 62 %, qu’il est plus compliqué d’obtenir des délais pour quitter les lieux ;
une impossibilité d’obtenir un délai sans un accompagnement socio-juridique et une difficulté croissante à bénéficier d’un accompagnement social ;
une accélération de la procédure (les ménages perdent environ 1 an selon l’ESH) ;
Des situations inacceptables, telles que des ménages expulsés pour quelques centaines d’euros, y compris parfois dans le parc social.
Cette approche est contreproductive pour les locataires comme pour les propriétaires. En effet, réduire les possibilités de résorption de la dette entraine les propriétaires dans des démarches coûteuses, aboutissant souvent à un impayé non remboursé.  
 
La Fondation pour le Logement n’a de cesse de rappeler que ces expulsions engendrent la précarisation de dizaines de milliers de personnes supplémentaires chaque année. Pour ces ménages, déjà fragilisés par le contexte économique et social difficile, les conséquences d’une expulsion locative sont nombreuses, graves et durables : à la fois sur leur parcours locatif, leur vie professionnelle, leur santé physique et mentale ainsi que celle de leurs enfants[1].
« Des personnes en situation de lourd handicap ou des familles monoparentales avec plusieurs enfants en bas âge, des personnes âgées et dépendantes sont parfois mises à la rue sans même une proposition d’hébergement. » s’alarme Christophe Robert. 
 
Alors qu’un nouveau plan de prévention des expulsions au niveau national était prévu par la précédente ministre du Logement, son départ laisse craindre qu’il ne reste lettre morte.
 
Dans ce contexte, la Fondation pour le Logement demande au nouveau gouvernement de revenir à une logique de prévention digne de ce nom, de relancer le plan prévu par le précédent gouvernement et de renforcer significativement le budget alloué à cette fin, pour éviter de nouveaux drames, tout en indemnisant les propriétaires.
 


[1] Étude mai 2022 « Que deviennent les ménages expulsés de leur logement ? »

Angèle Roblot
Chargée de relations médias
[email protected] 06 23 25 93 79
Chloe Mola
Assistante de relations médias
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