Un an après le cyclone Chido, la Fondation pour le Logement des Défavorisés (anciennement Fondation Abbé Pierre) publie son éclairage sur les conditions d’habitat et le vécu des habitants pendant et après le passage du cyclone. Elle y formule également des préconisations concrètes pour faire du droit au logement une réelle priorité politique de la refondation du 101ème département français.
En dévastant Mayotte, Chido, a mis en lumière les défaillances structurelles des politiques du logement et de résorption de l’habitat précaire, déjà existantes avant la catastrophe. En 2017, parmi les 73 880 logements recensés :
- près de 4 sur 10 étaient en tôle, pas uniquement dans les bidonvilles ;
- 29 % des logements n’avaient pas accès à l’eau courante ;
- 10 % des logements n’étaient pas raccordés à l’électricité.
Outre ces conditions d’habitat extrêmement précaires, le parc de logements très hétérogène, souvent non assuré et mal encadré, présentait déjà une grande vulnérabilité.
Ainsi, 60 % du bâti de l’île a été endommagé ou détruit et plus des 2/3 des logements collectifs ont subi des dommages.
L’aide apportée, privilégiant les habitants « assurés et réguliers », laisse les plus précaires à la marge. « Avec la saison des pluies qui arrive, j’avais peur que ce soit à nouveau inondé. Donc je me suis débrouillée pour faire faire une dalle », déclare une habitante vivant dans une case SIM1 agrandie.
Aujourd’hui, la situation est toujours alarmante. Alors que la nouvelle saison cyclonique a débuté, des milliers de ménages sinistrés restent privés de logement digne et décent. Les réponses institutionnelles tardent à se structurer, et ne sont pas partout ni pour tous opérationnelles. La loi de refondation de Mayotte d’août 2025 prévoit 200 millions d’euros sur quatre ans, pour l’aménagement, la résorption de l’habitat insalubre et pour la construction de 24 000 logements sans pour autant indiquer à ce stade la part de logements sociaux, leur localisation et la planification des opérations.
« Le temps est venu d’agir rapidement, concrètement et durablement en donnant la priorité aux ménages les plus précaires. Il est essentiel d’intervenir sur l’ensemble des problématiques de l’habitat avec des objectifs de résultat : mise en sécurité des sinistrés oubliés depuis un an ; amélioration de l’habitat privé en dur ; production de logements très sociaux ; régulation des loyers dans le privé ; transformation des bidonvilles en quartiers aménagés avec et par leurs habitants », demande Matthieu Hoarau, directeur régional de la Fondation pour le Logement.
Enfin, à Mayotte, les prestations sociales et familiales, RSA, AAH2, le Smic, sont plus faibles ou aux conditions d’attribution plus restrictives que dans l’Hexagone. Cela empêche les ménages d’accéder et de se maintenir dans un logement digne et décent faute de ressources suffisantes. L’ordonnance censée rapprocher progressivement la législation sociale de Mayotte de celle de l’Hexagone dès 2026 reste pour l’heure une promesse.
Les pouvoirs publics doivent se donner les moyens d’appliquer le droit au logement, en associant toutes les forces vives du territoire (État, collectivités, institutions, associations et habitant.es). C’est une condition indispensable pour sortir durablement de la spirale de la précarité et des crises récurrentes.
1 Offre en accession à la propriété, qui reprend la forme de l’habitat traditionnel, pour des ménages aux revenus très faibles, produite entre 1980 et 2004.
2 Allocation Adulte Handicapé.