À La Réunion, la Fondation tire la sonnette d’alarme
À l’occasion de la présentation de son éclairage régional, la Fondation dénonce une situation alarmante.

Un engagement dans la durée
La Fondation pour le Logement agit à La Réunion depuis 32 ans, via son agence Régionale. En 7 ans, elle a soutenu sur le territoire plus d’une centaine de projets portés par une quarantaine de partenaires. Actions d’accueil et de proximité, accompagnement au plus près des personnes, relogement, production de logement abordable (ex : maisons Relais), amélioration de l’habitat et coordination des acteurs ont permis d’apporter des réponses concrètes à près de 15 000 personnes parmi les plus exclues.
4 Réunionnais sur 10 touchés par la crise du logement
Forte de sa connaissance et de son expertise de terrain, de son indépendance financière et de parole - grâce à la générosité de ses donateurs - et de son rôle important dans l’animation des réseaux d’acteurs, la Fondation produit encore cette année son rapport sur l’état du mal-logement à La Réunion : 1 rapport qui présente des chiffres terriblement préoccupants pour le territoire et sa population, et qui met en évidence l’insuffisance des orientations et engagements politiques pour répondre avec ambition et réalisme à la situation. La crise du logement touche 4 réunionnais sur 10, soit près de 300 000 personnes.
« Pour accéder à un hébergement d’urgence, l’impuissance publique met en concurrence les personnes précaires, en les triant avec de nouveaux critères locaux pour évaluer leur « vulnérabilité » et finalement justifier d’abandonner 2 500 ménages non pris en charge. Il s’agit de personnes isolées, des femmes, des hommes et fait nouveau désormais des familles : plus de 1000 enfants sont restés à la rue en 2024 après des appels au 115. L’hébergement inconditionnel est devenu optionnel. Notre Etat, est-il encore, comme c’est écrit dans la loi, pleinement le garant de l’application du droit à l’hébergement ? Souhaite-t-il réellement protéger ses citoyens, et particulièrement les enfants en ne les laissant, même pas 1 nuit, à la rue ? » s’indigne Matthieu Hoarau, directeur de l’agence Régionale de la Fondation à La Réunion.
Pour co-construire des réponses à la hauteur des enjeux, et dans le cadre de la présentation de son rapport, la Fondation demande instamment au Préfet de La Réunion de créer, sous son égide, une cellule d’urgence ayant pour mission de faire face à l’urgence sociale, en réunissant les collectivités et les acteurs de la solidarité. Cette cellule devra en particulier œuvrer à mobiliser en urgence des bâtiments vacants, privés ou publics (ex : anciennes casernes, anciens établissement scolaires ou médicaux ; bureaux, etc.) pour les transformer en solutions d’hébergements et de logements intercalaires. Elle devra également renforcer les réponses de premier accueil sur l’ensemble du territoire (accueil de jour, accès à l’eau, bagagerie, etc.)
Des mesures pour lutter contre la vie chère à La Réunion dans les Outre-Mer
Près de 320 000 Réunionnais vivent aujourd’hui avec moins de 1100 euros par mois. Vivre sous le seuil de pauvreté dans les Outre-Mer, c’est aussi subir les prix, tant les écarts de prix sont criants avec l’Hexagone (+ 9% à La Réunion). Dans cette situation de double peine, le logement occupe une place critique dans le budget des ménages. Pour ceux ayant les plus faibles revenus, le logement représente 50 à 80% de leur budget total.
Et à ce jour, il existe une inégalité des droits entre l’Hexagone et les Départements d’Outre-Mer (DROM). La loi ne permet pas aux territoires tendus dans les Outre-mer d’expérimenter l’encadrement des loyers. Néanmoins, le 5 mars dernier, les sénateurs ont voté à l’unanimité une proposition de loi pour ouvrir l’expérimentation dans les DROM.
La Fondation salue cette avancée importante qu’elle espère voir se finaliser rapidement dans les agglomérations tendues et volontaires. Cette mesure sera un levier et un signe important d’action durable contre la vie chère dans les Départements d’Outre-Mer.
Habitat indigne et personnes âgées
Après les catastrophes climatiques dont ont été victimes des milliers de personnes en 2024 et 2025, alors que l’on dénombre 150 000 habitats indignes en Outre-mer (on en recense 450 000 dans l’Hexagone), la Fondation pour le Logement demande la mise en place, en urgence, d’un véritable plan de lutte contre l’habitat indigne, associé à des objectifs et des moyens ambitieux et adaptés aux enjeux.
À La Réunion, on dénombre plus de 22 000 bâtis précaires, particulièrement vulnérables face aux aléas climatiques. Parmi les personnes vivant en habitat précaire, se trouve une forte majorité de personnes âgées ou vieillissantes sur lesquelles la Fondation a décidé de porter une attention particulière dans son éclairage régional 2025 :
- 30 % des 60-74 ans et 37 % des 75 ans et plus vivent sous le seuil de pauvreté en 2021, contre 11,5 % et 11 % respectivement dans l’Hexagone (Insee 2021),
- 2 000 personnes de plus de 60 ans vivent dans des logements privés de confort minimal (pas d’accès à l’eau chaude et parfois ni douche ou ni WC intérieurs),
- 14 000 personnes de 60 ans ou plus vivent dans des maisons en bois (ou dur) sous tôle ou dans des habitations de fortune.
« Vivre dans un logement adapté constitue pourtant un droit fondamental. Les personnes âgées précaires ne sont pas suffisamment prises en compte dans les politiques publiques pour les accompagner à sortir de la rue, favoriser leur maintien à domicile dans des logements abordables, ou réhabiliter leurs logements indignes le plus rapidement possible. Trop souvent des personnes perdent la vie à la rue ou avant que l’instruction d’un dossier d’amélioration d’habitat aboutisse concrètement », déplore Matthieu Hoarau.